La revendication d’une démocratie avec des droits égaux pour toute la Palestine historique doit être déclarée haut et fort. Israël doit faire place à une réalité politique où les voix de tous les peuples sont entendues et où les droits de tous les peuples sont garantis.

DOSSIER – Le dôme de la mosquée du Rocher dans l’enceinte de la mosquée Al Aqsa vu dans la vieille ville de Jérusalem le samedi 15 juillet 2017. Vendredi, trois assaillants palestiniens ont ouvert le feu sur un site sacré, connu des musulmans sous le nom de Noble Sanctuaire, et des Juifs sous le nom de Mont du Temple, à l’intérieur de la vieille ville fortifiée, tuant deux policiers israéliens avant d’être abattus. (AP Photo/Mahmoud Illean, Fichier)

JERUSALEM (Opinion) – Jérusalem a été une ville arabe et musulmane pendant près de 1300 ans. Comme d’autres parties de la Palestine, c’était une mosaïque harmonieuse. Mais, bien qu’il y ait toujours eu une présence chrétienne et juive – à la fois de personnes et de monuments – c’était surtout une ville musulmane.

Elle fut violemment perturbée à deux reprises: d’abord en l’an 1099, où, pendant 88 ans, la ville fut occupée par les Croisés, puis en 1948, lorsque l’État juif nouvellement créé prit la ville et fit sienne Jérusalem. Lorsque l’État d’Israël prit la partie occidentale de la ville en 1948, en violation d‘une résolution des Nations Unies, il détruisit son caractère arabe et musulman et la déclara capitale du peuple juif.

Affirmer que Jérusalem – et en fait toute la Palestine – n’appartient qu’aux Juifs n’est pas seulement moralement inacceptable, mais aussi restreignant et insoutenable. À Jérusalem, comme dans le reste de la Palestine historique, les Israéliens et les Palestiniens d’aujourd’hui, bien qu’ils vivent à proximité les uns des autres, sont totalement séparés par un système d’apartheid. Les deux communautés vivent dans un seul État, sont gouvernées par le même gouvernement, mais évoluent dans des réalités complètement différentes et sous des lois différentes résultant du système juridique de l’apartheid israélien.

Si les États-Unis se soucient vraiment de la démocratie, la réponse à cette situation ne devrait pas être, de la part de Washington, de légitimer les revendications israéliennes pour une souveraineté exclusive. Washington devrait plutôt soutenir une transition en faveur d’une démocratie où les droits de chacun sont respectés et garantis par la même loi.

Une histoire moderne de conquête et d’oppression

A group of struggling Arab refugees walk along the dusty road from Jerusalem to Lebanon, carrying their meager belongings with them, Nov. 9, 1948. The Arabs have been driven from their homes by Jewish attacks in Galilee. (AP/Pringle)

Un groupe de réfugiés arabes en difficulté parcourent la route poussiéreuse qui va de Jérusalem au Liban, emportant avec eux leurs maigres biens, le 9 novembre 1948. Les Arabes ont été chassés de leurs foyers par les attaques juives en Galilée. (AP/Pringle)

Le 29 novembre 1947, l’Assemblée générale des Nations Unies vota pour la partition de la Palestine et l’établissement d’un État juif dans certaines parties du pays, ainsi qu’un État arabe. Le plan stipulait clairement que « le régime international pour Jérusalem, la huitième division, [doit] être administré par le Conseil de tutelle des Nations Unies » et qu’il ne devrait faire partie d’aucun des deux États.

Mais les dirigeants Sionistes l’ignorèrent, et la conquête de Jérusalem, ainsi que d’autres parties de la Palestine, avança à toute vitesse. Elle fut suivie d’une campagne brutale de nettoyage ethnique – reconnu comme un crime contre l’humanité, selon les Nations unies. La campagne de Jérusalem – dans laquelle 39 villages ont été détruits et huit quartiers de la ville ainsi que les alentours ont été complètement vidés de leurs habitants palestiniens par des milices sionistes armées et largement soutenues par la Grande-Bretagne – est décrite en détail dans le livre d’Ilan Pappe, The Ethnic Cleansing of Palestine/Le Nettoyage Ethnique de la Palestine (voir p. 194).

Ironiquement, ce n’est que le 13 décembre 1949 – plus d’un an et demi après la création de l’État d’Israël et l’expulsion forcée de la majorité des Palestiniens, mais seulement quatre jours après que les Nations Unies aient réaffirmé la résolution selon laquelle Jérusalem devrait être placée « sous un régime international permanent » – que le gouvernement israélien a déclaré que Jérusalem serait la capitale d’Israël.

La communauté internationale n’a jamais reconnu les revendications israéliennes sur la ville, et aucun pays avec lequel Israël entretient des relations diplomatiques n’a d’ambassade à Jérusalem.

L’annonce de Donald Trump selon laquelle les États-Unis reconnaissent Jérusalem comme la capitale d’Israël était en fait une légitimation de l’occupation illégale et du nettoyage ethnique – ou, plus précisément, de la désarabisation, puisque, comme nous le voyons à Jérusalem-Ouest, seuls les Juifs étaient autorisés à rester et à habiter la ville.

Dans mon livre, The General’s Son: Journey of an Israeli in Palestine (Le Fils d’un Général : Le Voyage d’un Israélien en Palestine), je raconte une histoire qui m’a été racontée par ma mère sur cette période de l’histoire de la ville. Ma mère est née à Jérusalem en 1926, et en 1948, lorsque les forces juives ont forcé la population palestinienne à quitter Jérusalem, leurs maisons devenues vacantes ont été mises à la disposition des familles juives…

Ma mère n’avait alors que 22 ans et était déjà une jeune mère. On lui offrit aussi une belle maison dans le quartier Qatamonne de Jérusalem. Cependant, elle a refusé l’offre, affirmant qu’elle refusait de prendre la maison d’une autre famille devenue réfugiée.

« Peux-tu imaginer comme leur foyer doit leur manquer », me disait-elle en répétant l’histoire encore et encore. Elle décrivait ensuite les terribles pillages qui ont eu lieu alors que les familles palestiniennes devaient fuir et n’avaient pas eu le temps d’emporter leurs biens avec elles.

Pour les dirigeants sionistes, le nettoyage ethnique de la Palestine était un objectif stratégique majeur. Il y a de nombreuses citations qui montrent à quel point ils ont été heureux quand il a été rempli et, bien que les chiffres exacts ne soient pas clairs, près d’un million de Palestiniens ont été forcés de partir. Le Premier ministre israélien, David Ben-Gourion, a déclaré ce qui suit en référence à Jérusalem lors d’une visite dans la ville en février 1948 :

Quand je viens maintenant à Jérusalem, j’ai l’impression d’être dans une ville juive (Ivrit) (…) Il est vrai que toute Jérusalem n’est pas juive, mais elle a déjà un énorme bloc juif : quand on entre dans la ville par Lifta et Romema, en passant par Mahaneh Yehuda, King George Street et Mea Shearim – il n’y a pas d’Arabes. Dans de nombreux quartiers arabes à l’Ouest, on ne voit même pas un seul Arabe. » (Le nettoyage ethnique de la Palestine, p. 142)

La capitale unifiée d’Israël

Arabs are led blindfolded to interrogation by Israeli soldiers in the old city of Jerusalem, June 8, 1967. (AP Photo)

Des Arabes sont conduits les yeux bandés vers l’interrogatoire par les soldats israéliens dans la vieille ville de Jérusalem, le 8 juin 1967. (AP Photo)

Ce n’est qu’en 1967, quand Israël acheva la conquête de la Palestine, qu’il compléta également la conquête de la ville de Jérusalem en prenant la partie orientale de la ville. Puis, une fois de plus, Israël s’est lancé dans une campagne – qui se poursuit encore en 2017, cinquante ans plus tard – de nettoyage ethnique, détruisant les quartiers et les villages autour de la ville, et ne construisant que pour les Juifs.

Le quartier des Maghrébins ou quartier marocain de la Vieille Ville de Jérusalem fut l’un des premiers à être rasé au bulldozer et ses habitants contraints de partir pour faire place à une grande place devant le Mur occidental. A Silwan-Wadi Hilwe, qui se trouve au pied de la Vieille Ville, juste en dessous du Haram Al-Sharif, ou le Noble Sanctuaire, se trouve une communauté palestinienne d’environ 50 000 personnes. En parcourant Silwan, on peut voir que les maisons palestiniennes sont détruites par des fouilles archéologiques qui font partie du parc archéologique de la Cité de David – un projet israélien qui veut prouver que le roi biblique David y résidait autrefois.

Dans le même temps, des colons juifs – certains américains, d’autres israéliens – soutenus par des milices et des policiers sionistes armés, forcent les familles à quitter leurs foyers pour que les Juifs puissent les prendre. En août 2017, le ministre israélien de la Sécurité publique, Gil’ad Erdan – dont le bureau est également chargé de mener la lutte d’Israël contre le boycott, le dessaisissement et les sanctions, ou la campagne BDS – a visité Silwan et a déclaré que son bureau ferait tout son possible pour assurer la sécurité de toute famille juive désireuse de s’installer à Jérusalem-Est.

En 1980, la Knesset israélienne a adopté la Loi de Jérusalem, qui déclara les deux parties de la ville comme la capitale unifiée d’Israël, en espérant sans doute que cela réglerait une fois pour toute la question de la souveraineté de la ville. Mais la réalité est que, bien qu’Israël essaie de prétendre que les Palestiniens n’ont aucun droit sur Jérusalem, il ne peut pas changer le fait que Jérusalem est toujours une ville sainte pour les Arabes et les musulmans du monde entier. Tout enfant palestinien vous dira que Jérusalem est la capitale de la Palestine.

Chaque vendredi, des bus de familles palestiniennes de toutes les parties de la Palestine, en particulier des villes et villages de 1948, viennent à Jérusalem pour prier à la mosquée d’Al Aqsa. Je les vois depuis des années : jeunes et vieux, ils bravent les longues heures de voyage à travers les postes de contrôle militarisés, le harcèlement régulier des forces de sécurité israéliennes, et le risque très réel d’être retenus par la police israélienne et de ne jamais se rendre à la mosquée. Il n’est pas rare que la police israélienne les empêche même d’entrer dans la Vieille Ville. Souvent, les Palestiniens auront alors recours à la prière sur le trottoir à l’extérieur de la Vieille Ville s’ils sont empêchés d’entrer.

An Israeli police officer raises his baton on Palestinians worshipers near the Al Aqsa Mosque in Jerusalem's Old City, July 27, 2017 (AP/Mahmoud Illean)

Un officier de police israélien lève son bâton sur les fidèles palestiniens près de la mosquée Al Aqsa dans la vieille ville de Jérusalem, 27 juillet 2017 (AP/Mahmoud Illean)

Répondre à Trump par une demande de démocratie et de respect

Il n’est pas difficile de voir que la réalité à Jérusalem est un microcosme de toute la Palestine. Il s’agit d’une réalité qui ne peut pas durer et qu’il ne faut pas laisser perdurer. La déclaration de Trump reconnaît et, ce qui est encore plus destructeur, légitimise le racisme systémique, le nettoyage ethnique et la violence contre un peuple autochtone.

La réponse à cela est d’exiger le respect des droits de toutes les personnes, quelle que soit leur foi ou leur race. Pas une religion, une nation, une souveraineté imposée par la force, mais une démocratie avec des droits égaux qui respecte les droits de l’homme et la dignité humaine de tous.

La revendication d’une démocratie à droits égaux pour toute la Palestine historique doit être exprimée haut et fort par tous les citoyens de conscience et par la communauté internationale.

Israël doit faire place à une réalité politique où les voix de tous les peuples sont entendues et où les droits de tous les peuples sont garantis.

C’est ce qui a inspiré le mouvement BDS, dont les revendications comprennent la fin de l’occupation militaire, l’octroi de droits égaux et le retour des réfugiés palestiniens chez eux, dans leur pays.

Si nous pouvons apprendre quelque chose des exemples donnés par la résistance non-violente qui a mis fin à l’apartheid en Afrique du Sud par le biais du BDS, alors soutenir une solution à un seul État est précisément la bonne réponse et la bonne action pour faire face à la déclaration sur Jérusalem de Donald Trump et à l’occupation israélienne de la Palestine.

Photo du haut | Le dôme de la Mosquée du Rocher dans l’enceinte de la mosquée d’Al Aqsa est visible dans la vieille ville de Jérusalem, le 15 juillet 2017. (AP/Mahmoud Illean)

Miko Peled est un militant israélien-américain bien connu, auteur, et professeur de karaté. Peled est l’auteur de The General’s Son: Journey of an Israeli in Palestine, et s’exprime dans le monde entier.

Traduction : Irène

Source: http://www.mintpressnews.com/one-state-solution-with-equal-rights-is-the-only-answer-to-trumps-jerusalem-declaration/235569/

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